jeudi 3 décembre 2015



LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME

Quelle indemnisation pour les victimes d’attentat terroriste ?

A moins d’un mois des terribles événements ayant touché la France le vendredi 13 novembre 2015, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme (FGTI) devrait prochainement, si ce n’est déjà commencé, adresser aux victimes directes et indirectes les premières offres provisionnelles.
Ce fonds de garantie a été créé spécifiquement pour les victimes d'actes de terrorisme, par la loi du 9 septembre 1986,
Financé par des prélèvements effectués sur les contrats d’assurance de biens, le FGTI indemnise au titre de la solidarité nationale les victimes et les ayants droits, quelle que soit leur nationalité, d’acte de terrorisme perpétré sur le territoire national et durant un délai de 10 ans à compter de la consolidation de la victime.

1.          Saisine du FGTI
La procédure d'indemnisation devant le FGTI est, généralement initiée par le procureur de la République mais il peut également « s’autosaisir », et ainsi contacter les victimes.
En l'absence d'une prise de contact par le FGTI, une personne, qui estime être victime d'un acte de terrorisme ou son ayant droit, peut aussi s'adresser directement au fonds.
Les demandeurs sont tenus de constituer un dossier d'indemnisation et peuvent utiliser les formulaires d'indemnisation mis à leur disposition sur le site internet du FGTI (http://www.fondsdegarantie.fr/ actes-de-terrorisme).
La victime ou tout demandeur devra néanmoins être particulièrement vigilant lors de la constitution de son dossier, car celui-ci sera déterminant dans l’évaluation de l’indemnisation à venir.

2.          Traitement de la demande d'indemnisation
Le FGTI est tenu “dans un délai d'un mois à compter de la demande” de verser une provision à valoir sur l’indemnisation définitive du préjudice à la victime qui a subi une atteinte à sa personne ainsi qu'à ses ayants droits, en cas de décès de la victime directe.
Pour les victimes blessées, l’indemnisation définitive ne pourra intervenir qu’après la consolidation de leur état de santé, laquelle sera constatée lors d’une expertise médicale amiable.
Cette expertise permettra d’apporter des précisions sur la consistance de l'atteinte à la personne ainsi que sur ses conséquences patrimoniales et extrapatrimoniales.
Il est vivement conseillé à la victime de se faire assister, lors de cet examen, par un médecin spécialisé.
En effet, le FGTI est « payeur » au titre de la solidarité nationale, et la victime se trouvera seule face au médecin mandaté par le FGTI.
Il est dès lors dans son intérêt d’avoir au préalable été préparée à cette réunion et d’y être assistée par un avocat spécialisé et/ou un médecin, lequel devra veiller à ce que le rapport d'expertise fasse état de toutes les répercussions physiques et psychiques de l'acte de terrorisme, y compris des traumatismes spécifiques aux victimes.
La victime bénéficie d'une “réparation intégrale des dommages résultant d'une atteinte à la personne” et elle sera notamment indemnisée:

-        des frais d'hospitalisation, de soins, de rééducation et pharmaceutiques ;
-        des frais de transports ;
-        des frais d'adaptation du logement et du véhicule ;
-        des frais liés à l'assistance d'une tierce personne ;
-        des pertes de revenus professionnels (actuels et futurs) ;
-        du déficit fonctionnel (permanent ou temporaire) ;
des souffrances endurées ;
-        des préjudices esthétiques, sexuel, d'agrément et d'établissement.

S'y ajoute un chef de préjudice spécifique, appelé préjudice exceptionnel spécifique des victimes de terrorisme (PESVT), qui correspond aux effets psychologiques de l'attentat.
Ce préjudice est évalué forfaitairement à 40 % de la somme allouée au titre de l'incapacité permanente.
Les ayants droits d'une victime directe décédée sont en droit de réclamer la réparation des chefs de préjudice suivants :
-        les frais d'obsèques ;
-        le préjudice économique (perte du soutien financier) ;
-        le préjudice d'affection.

Une fois que le fonds de garantie détient les justificatifs de tous les préjudices invoqués par le demandeur, il dispose d'un délai de trois mois pour lui présenter une offre d'indemnisation.
Il est très important, pour la victime d’être conseillée par un professionnel ou une association de victime, lequel veillera à ce que tous les préjudices soient indemnisés et de manière juste.

3.          Statut de victime civile de guerre, pupille de la nation et exonération de droits successoraux.
Enfin, il est important de rappeler que le législateur a rendu applicable aux victimes d'actes de terrorisme la législation sur les victimes civiles de guerre.
Ainsi, les victimes d'actes de terrorisme et leurs ayants droits bénéficient des droits et avantages figurant au Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, comme la pension de victime civile, le droit aux soins gratuits pour les infirmités résultant de l'acte de terrorisme, le bénéfice de la carte d'invalidité dont le taux sera celui de la pension.
Pour les fonctionnaires civils, victimes d'événements auxquels ils ont été exposés dans le cadre de leurs fonctions et qui se trouvent dans l'impossibilité de poursuivre l'exercice de celles-ci, des avantages spéciaux relatifs à leurs droits à pension ont été ouverts.
De même, les victimes d'un acte de terrorisme âgées de moins de 21 ans ainsi que les enfants de victimes d'actes de terrorisme décédées peuvent être adoptés en qualité de pupille de la Nation et bénéficier, à ce titre, du droit au soutien moral et matériel de l'État.
Enfin, la législation fiscale exonère des droits de mutation par décès les successions de personnes décédées du fait d'actes de terrorisme.

La liquidation de préjudice corporel répond à des critères spécifiques et nécessitent pour la victime, une importante préparation tant dans le recueil de documents médicaux et administratifs que psychologique.
La procédure sera longue et douloureuse, c’est pourquoi, il ne peut être que recommandé aux victimes et leurs familles de se faire aider et assister dans leurs démarches face au fonds de garantie.

Cécile Bigre
Avocat à la Cour
 

Aucun commentaire: